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BLOG DU PROCES EN APPEL
 
 
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Extrait du jugement rendu au nom du peuple français le 20 juin 2006

« il est donc évident que les services secrets français avaient eu connaissance du projet de coup d’Etat conçu par Robert Denard, de ses préparatifs et de son exécution.
Il est tout aussi manifeste qu’au moins ils n’avaient rien fait pour l’entraver et qu’ils l’avaient donc laissé arriver à son terme.
En conséquence, c’est que les responsables politiques l’avaient nécessairement voulu ainsi ; ce qui est à rapprocher du fait que, comme vu ci-dessus, Mohamed Djohar, après l’opération Azalée, n’avait nullement été rétabli dans ses fonctions présidentielles. »


PROCES EN APPEL

Le 8 décembre 2006 s’est tenue au palais de justice de Paris l’audience de fixation du procès en appel du colonel Bob Denard. Celui-ci aura lieu du 6 au 15 juin 2007, juste après l’élection présidentielle.
Commentaire d’une des victimes des scandaleuses condamnations du 20 juin : « La justice française est tellement indépendante qu’elle n’a pas voulu prendre le risque d’interférer avec le débat électoral en jugeant en pleine campagne une affaire gênante pour le pouvoir ».

Lors du procès en première instance, on avait vu défiler à la barre des cohortes d’avocats de pseudo victimes exprimant des demandes aussi pharaoniques qu’incongrues. Seules avaient été jugées recevables celles de « la société Gouvernement de l’union des Comores » (sic) et de l’ancien président Djohar. Toutes ces prétentions seront à nouveau examinées lors du procès en appel. La morale voudrait que toutes ces pseudo victimes soient déboutées. Mais qu’en dira la justice ?

Quant aux véritables victimes de cette affaire, à savoir le colonel Denard et ses hommes, ils attendent toujours les propositions de l’Etat en vue de leur indemnisation.

Le compte rendu des audiences des 6, 7 et 8 juin 2007

Alors que le calendrier prévoyait deux semaines de débats, le procès en appel du colonel Robert Denard s’est finalement déroulé en trois jours, du 6 au 8 juin 2007.

Dispensé de présence pour raisons de santé, le colonel Denard était représenté par son avocat maître Elie Hatem. De fait, son état s’est encore aggravé depuis le 20 février 2006 où, tenant absolument à se présenter face à ses juges, il avait bravé la maladie pour être présent à l’ouverture des débats.

Plus surprenante était l’absence de la plupart des avocats des parties civiles. Seul maître François Trécourt, représentant le gouvernement des Comores, était présent. Les autres, ceux qui vitupéraient lors du procès en première instance, ceux qui exigeaient « au moins douze audiences » en appel pour faire valoir les droits de leurs clients à des indemnisations pharaoniques ? Absents.

En campagne électorale, Saïd Larifou n’avait pas jugé opportun de gratifier la Cour de sa présence, pas plus que sa multitude de confrères prétendant représenter « les veuves et ayants droit » de l’ancien président Djohar. Certaines prétendues victimes se présentèrent le deuxième jour, sans avocat ni aucun document prouvant leur qualité d’ayant droit, ni le début d’une description de leur préjudice, ni même l’esquisse de l’évaluation du montant du prétendu préjudice.

La Cour d’Appel avait un lourd défi à relever. Après les débordements du procureur Olivier Bray qui, lors du procès en première instance, au terme d’un ahurissant réquisitoire, s’en était directement pris au président du tribunal, l’image de la justice était au plus bas dans l’esprit des soldats du colonel Denard.

N’ayant « aucune confiance dans la justice de leur pays » et estimant que les incroyables condamnations prononcées en première instance étaient « le prix à payer pour le service de la France », les membres de la force spéciale du colonel Denard avaient uniquement fait appel des dispositions civiles du jugement, dans le seul but de na pas ajouter la ruine au préjudice moral qu’ils avaient subi. Seul le colonel Denard était donc rejugé, le parquet ayant estimé qu’une condamnation avec sursis ne suffisait pas.

Maître Philippe Gérard, avocat de trois appelants, exposa brillamment les raisons qui devraient conduire la Cour à constater l’irrecevabilité des parties civiles : la co-responsabilité de la France, le caractère indirect des préjudices supposés, l’imprécision de la qualité juridique du « gouvernement de l’Union des Comores» , pour ne citer que quelques unes de ses idées forces, tous ces arguments appuyés sur une imposante jurisprudence furent remis à la Cour sous la forme de conclusions écrites imparables.

Il se confirma au cours des audiences que si l’ancien président Djohar avait pu subir un préjudice, c’était du fait de la France qui l’avait déporté à la Réunion après sa destitution, et non pas du fait de l’équipe de Bob Denard.

Ces trois journées d’audience on imposé quelques réalités aux yeux de tous, à commencer par l’évidente implication de l’état français dans l’opération menée par le colonel Denard en septembre 1998. Même l'avocate générale Marthe Coront-Ducluzeau finit par en convenir et se limita dans son réquisitoire à tenter de la minimiser : « accompagner une action n’est pas la même chose que la commanditer », déclarait-elle, « laissant à l’immense sagesse de la cour » le soin d’apprécier cette reconnaissance de responsabilité.

Pour finir, Elie Hatem rappela opportunément qu’en 1978, suite au coup d’état qui avait porté Ahmed Abdallah au pouvoir avec le même mode opératoire qu’en 1995, Bob Denard avait été décoré et non pas poursuivi. Il évoqua la participation directe de la France dans le coup d’état : « la France ne fait pas que donner l’ordre, elle donne aussi les moyens ». De fait, le texte du jugement de première instance établissait clairement que la porte de la présidence avait été ouverte par l’officier français chargé de la sécurité, sur reconnaissance du mot de passe « Stanislas ».

Quant aux demandes d’indemnisation des frais de justice des parties civiles, l’avocate d’un des membres de l’équipe de Bob Denard se livra à un rapide calcul qui en fit comprendre l’énormité : « compte tenu du temps passé sur le dossier, cela fait 17 000 euros de l’heure ». De quoi rendre le métier intéressant…

L’affaire a été mise en délibéré et le jugement sera rendu le 6 juillet. Hasard ou symbole ? C’est précisément le jour de la fête nationale comorienne, en souvenir de la déclaration d’indépendance du 6 juillet 1975 qui constitua le point de départ de l’aventure comorienne du colonel Bob Denard.

6 juillet 2007 : le jugement de la honte pour la France

La 10e chambre de la cour d'appel de Paris, présidée par Jean Gouyette, a condamné le colonel Bob Denard à 1 an de prison ferme, plus 3 ans de prison avec sursis assorti de « mise à l’épreuve », auxquels s’ajoutent 100 000 euros d’amende.

Condamné à de la prison ferme et ruiné, alors qu’il a consacré sa vie à servir la France dans l’ombre et la tourmente, voilà le remerciement de la France au colonel Denard.

Il faut noter, même si « cela ne constitue pas une circonstance atténuante » commente un autre volontaire, que la cour d’appel n’a cependant pas été au bout de sa logique. Elle aurait pu révoquer le sursis d’une condamnation antérieure, expédiant le colonel Denard en prison pour 5 ans, c’est-à-dire à la mort car il est gravement malade. Elle s’en est abstenue, laissant cette responsabilité à un obscur juge d’application des peines qui devra décider s’il doit ou non renvoyer Bob Denard derrière les barreaux pour les quelques mois de différence entre sa peine et la détention provisoire qu’il a déjà subie.

La cour d’appel a d’autre part rejeté les demandes d’indemnisation des prétendues victimes de l’opération « Kashkazi » car elles étaient trop évidemment contraires au droit. Celle du gouvernement comorien, qui ne dispose pas de la personnalité juridique a été jugée irrecevable. Quant à ceux qui se présentaient comme ayant droit de l’ancien président comorien Djohar, ils ont été déboutés car celui-ci avait, de son vivant, expressément et explicitement renoncé à toute poursuite.

Une page d’histoire se tourne. Le moins qu’on puisse dire est que l’image de la République française n’en sort pas grandie.